Lame mince de roche (éclogite à disthène et corindon) en lumière polarisée analysée au microscope optique © LMV

De l’hydrogène moléculaire dans les minéraux du manteau : vers une nouvelle compréhension du stockage et du fractionnement isotopique de l’eau profonde

Résultat scientifique Terre Solide

Grâce à des roches remontées de très grande profondeur (170 km), des chercheurs du laboratoire Magmas et Volcans ont pu identifier pour la première fois de l’hydrogène sous sa forme réduite, H2, dans le manteau terrestre. Cet hydrogène réduit a été découvert dans des éclogites du craton sibérien, issues de roches volcaniques sous-marines ayant interagi avec l’eau des océans il y a plus de 2,5 milliards d’années. Ces roches ont ensuite été enfouies dans la terre profonde par subduction. Lors des éruptions kimberlitiques, extrêmement puissantes, des fragments de ces éclogites ont été rapidement remontés à la surface, figeant ainsi leur composition chimique et leur minéralogie.

Communément dissout sous sa forme oxydée OH-, l’hydrogène est très commun dans les minéraux qui composent le manteau terrestre. Ainsi, l’équivalent de plusieurs océans pourraient être enfouis à l’intérieur de la planète. Ici, les chercheurs ont trouvé une spéciation de l’hydrogène très discrète et qui pourrait représenter un mode de stockage important aux hautes pressions correspondant à l’intérieur de la Terre, où règnent aussi des conditions réduites propices à la formation de H2. L’analyse spectroscopique de ces roches montre des teneurs en H2 élevées (jusqu’à ~500 ppm en poids) et les analyses isotopiques ont révélé un comportement des isotopes hydrogène 1H et deutérium 2D inédit. En effet, le rapport D/H augmente dans la roche avec la déshydratation, supposant que l’hydrogène part préférentiellement dans le fluide, ici riche en H2, contrairement au comportement connu entre un minéral et un fluide riche en H2O.  Cette découverte a de nombreuses implications sur notre compréhension du cycle de l’eau interne telle que racontée par les isotopes.

Éclogite bi-minérale, composée d'omphacite (vert) et de grenat (rose), provenant de la mine de Robert Victor en Afrique du Sud

En savoir plus

Molecular hydrogen in minerals as a clue to interpret ∂D variations in the mantle – Nature Communications 11, article n°3604

B. N. Moine, N. Bolfan-Casanova, I. B. Radu, D. A. Ionov, G. Costin, A. V. Korsakov, A. V. Golovin, O. B. Oleinikov, E. Deloule & J. Y. Cottin

https://doi.org/10.1038/s41467-020-17442-8

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