L’âge de la surface de l’astéroïde Bennu rajeuni par l’analyse de ses cratères

Résultat scientifique Univers

Tous les corps solides du Système solaire sont exposés à des populations d’objets qui produisent des impacts sur leur surface. Dans le cas de l’astéroïde Bennu, dont la sonde OSIRIS-REx (NASA) a récolté des échantillons qui arriveront sur Terre en septembre 2023, sa surface a été exposée aux astéroïdes qui résident dans sa région d’origine, la ceinture des astéroïdes, entre Mars et Jupiter, puis à ceux qui, comme lui actuellement, croisent la trajectoire de la Terre.

Dans une nouvelle étude, des scientifiques analysent les cratères de Bennu et observent un déficit de petits cratères (de tailles inférieures à quelques mètres) par rapport à l’abondance attendue sur la base du grand nombre de petits projectiles auxquels l’astéroïde est soumis pendant son évolution. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce déficit, et les auteurs ont identifié celle qui domine dans le cas de Bennu. L’astéroïde est un agrégat dont la surface est entièrement peuplée de gros rochers, de cailloux et de graviers (voir Figure 1). Lorsqu’un projectile tape sur une roche de taille identique ou plus grande, celle-ci peut servir de bouclier. Cela empêche la formation d’un cratère ou réduit fortement la trace laissée par l’impact (voir Figure 2).

L’estimation de l’âge d’une surface repose sur la mesure de l’abondance et des dimensions de ses cratères. Alors que les études précédentes donnaient un âge de surface de Bennu de plusieurs centaines de millions d’années à 1 milliard d’année, cette nouvelle analyse aboutit à un âge de surface de l’ordre de 1.6–2.2 millions d’années pour les cratères plus petits que quelques mètres, et de l’ordre de 10–65 millions d’années pour les cratères plus grands que 100 mètres. L’âge maximum de la surface de Bennu est donc réduit d’un facteur 15, au moins, par rapport aux estimations précédentes. Cette différence énorme démontre l’importance de mieux comprendre le processus d’impact pour estimer, de manière fiable, les âges de surface et élaborer des scénarios robustes de l’histoire des corps considérés.

Cette étude bénéficie du soutien financier du CNES et du contrat No 870377 du programme H2020 de l’Union Européenne (projet NEO-MAPP).

Figure 1 : À gauche : L’astéroïde Bennu dans sa totalité. À droite : une portion de la surface de Bennu montrant une abondance incroyable de roches de surface. © NASA, University of Arizona
D’après Bierhaus et al. (2022) © NASA, Université d’Arizona.

Figure 2 : Exemples de petits cratères sur Bennu. Leur taille est de 4, 6 et 2,7 mètres environ de gauche à droite. Contrairement aux grands cratères sur Bennu ou ceux sur les surfaces planétaires, ces cratères n’ont pas de bords distincts entourant une dépression. Ils sont plutôt entourés plus ou moins complètement d’un anneau de roches déplacées par l’impact. De plus, la taille des particules de surface est bien plus petite en moyenne dans le cratère qu’à l’extérieur. Les projectiles qui ont produit ces cratères ont tapé sur une roche de surface de taille équivalente à la leur, la cassant et empêchant ainsi la formation d’un cratère classique, voir empêchant la présence de toute trace. 

En savoir plus

Crater population on asteroid (101955) Bennu indicates impact armouring and a young surface – Nature geoscience

E. B. Bierhaus, D. Trang, R. T. Daly, C. A. Bennett, O. S. Barnouin, K. J. Walsh, R.-L. Ballouz, W. F. Bottke, K. N. Burke, M. E. Perry, E. R. Jawin, T. J. McCoy, H. C. Connolly Jr., M. G. Daly, J. P. Dworkin, D. N. Della Giustina, P. L. Gay, J. I. Brodbeck, J. Nolau, J. Padilla, S. Stewart, S. Schwartz, P. Michel, M. Pajola, D. S. Lauretta

https://doi.org/10.1038/s41561-022-00914-5

Contact

Patrick Michel
Chercheur CNRS au laboratoire Lagrange – OCA