Les feux de Bételgeuse

Univers

Une nouvelle image dévoile une vaste nébuleuse autour de la fameuse étoile supergéante

 En utilisant l'instrument VISIR, installé sur le très grand télescope (VLT) de l'ESO, des astronomes ont réalisé une image détaillée comme jamais auparavant de la nébuleuse complexe et lumineuse autour de l'étoile supergéante Bételgeuse. Cette structure, qui ressemble à un feu émanant de l'étoile, est formée à partir de ce monstre stellaire qui répand sa matière dans l'espace.

Bételgeuse, supergéante rouge dans la constellation d'Orion, est une des étoiles les plus brillantes du ciel nocturne. C'est également l'une des plus grosses, ayant une taille correspondant pratiquement à l'orbite de Jupiter - environ quatre fois et demie le diamètre de l'orbite terrestre.  L'image du VLT montre la nébuleuse environnante, bien plus grande  que la supergéante elle-même, qui s'étend sur 60 milliards de kilomètres au-delà de la surface de l'étoile, soit environ 400 fois la distance Terre-Soleil.

Les supergéantes rouges comme Bételgeuse constituent l'une des dernières phases de la vie d'une étoile massive.  Pendant cette brève tranche de vie, l'étoile augmente en taille et expulse ses couches externes dans l'espace à un rythme incroyable - elle se débarrasse d'immenses quantités de matière (environ la masse du Soleil) en seulement 10 000 ans.

Le processus par lequel une étoile comme Bételgeuse expulse sa matière implique deux phénomènes. Le premier est la formation de gigantesques colonnes de gaz (cependant bien plus petite que la nébuleuse observée) s'étendant dans l'espace à partir de la surface de l'étoile, détectées précédemment en utilisant l'instrument NACO sur le VLT[1]. L'autre, qui fait suite à l'éjection de la colonne, est le vigoureux mouvement ascendant et descendant de bulles géantes dans l'atmosphère de Bételgeuse - comme de l'eau qui bout s'agite dans une casserole.

Les nouveaux résultats montrent que les colonnes que l'on voit à côté de l'étoile sont probablement connectées à des structures dans la nébuleuse extérieure maintenant photographiée dans l'infrarouge avec VISIR. La nébuleuse ne peut pas être vue en lumière visible, car Bételgeuse la noie totalement dans son éclat. La forme irrégulière et asymétrique de la matière indique que l'étoile n'a pas éjecté ses couches externes de manière symétrique. Les bulles de matière stellaire et les colonnes géantes qu'elles engendrent sont probablement responsables de l'aspect fragmenté de la nébuleuse. 

La matière visible dans les nouvelles images est probablement constituée de poussière d'oxyde d'aluminium et de silicate. C'est le même matériau qui forme la majeure partie de la croûte terrestre et des autres planètes rocheuses. A un certain moment il y a bien longtemps, les silicates de la Terre ont été formés par une étoile massive (et maintenant éteinte) semblable à Bételgeuse.

© ESO.

Dans cette image composée, les précédentes observations par NACO des colonnes sont représentées dans le disque central. Le petit cercle rouge au milieu a un diamètre d'environ quatre fois et demie celui de l'orbite terrestre et représente l'emplacement de la surface visible de Bételgeuse. Le disque noir correspond à une partie très lumineuse de l'image qui a été masquée afin de permettre à la nébuleuse, dont le rayonnement est bien moins fort, d'être visible. Les images de VISIR ont été prises à travers des filtres infrarouges sensibles aux rayonnements de différentes longueurs d'onde avec le bleu correspondant aux plus courtes d'entres elles et le rouge aux plus longues. Le champ est de 5,63x5,63 arcsecondes.

 


[1] NACO est un instrument du VLT qui combine le système d'optique adaptative Nasmyth NAOS (NAOS pour Nasmyth Adaptive Optics System) et l'imageur et spectrographe en proche infrarouge CONICA. Il permet de faire de l'imagerie assistée par de l'optique adaptative, de la polarimétrie en images, de la chronographie et de la spectroscopie dans les longueurs d'onde proche infrarouge. Le système d'optique adaptative NAOS a été développé en France par l'ONERA, et dans des laboratoires associés au CNRS à l'Observatoire de Paris et à l'Observatoire des Sciences de l'Univers de Grenoble (INSU, Université Joseph Fourier).

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