Et si nos océans (sub)tropicaux captaient plus de CO2 que prévu ?

Résultat scientifique Océan Atmosphère

L’océan constitue un puits de carbone, porteur d’enjeux majeurs dans l’évolution du climat. Parmi les phénomènes impliqués dans le piégeage de CO2 par l’océan, le plancton végétal (ou phytoplancton) absorbe le CO2 par photosynthèse, fabrique de la matière organique constituée de carbone, qui est transférée le long de la chaine alimentaire marine. A la mort des organismes, une partie de ce carbone sédimente au fond des océans sous forme de neige marine, soustrayant ainsi du CO2 à l’atmosphère. C’est ce que l’on appelle la pompe biologique à carbone. De nouvelles études montrent que cette pompe pourrait capter plus de carbone que prévu.

L’océan (sub)tropical (~50% de la surface de l’océan global) est considéré comme peu efficace à piéger du CO2, car il est pauvre en azote (un nutriment essentiel), ce qui limite la croissance du phytoplancton. Ces vastes régions abritent pourtant des organismes appelés ‘diazotrophes’, qui fixent du CO2 et fertilisent aussi les eaux de surface en azote, soutenant ainsi la chaîne alimentaire. Cependant, il est aujourd’hui admis que les diazotrophes ne chutent pas vers l’océan profond, mais sont recyclés dans la couche de surface, restituant leur CO2 à l’atmosphère. Des études menées dans le cadre du projet TONGA (Pacifique Sud) remettent en cause ce paradigme : c’est en effectuant des mesures dans l’océan profond à l’aide d’un couplage d’outils collectant la neige marine qu’une équipe de recherche d'un domaine INSU (voir encadré) a démontré que les diazotrophes chutent vers l’océan profond, contribuant à la majeure partie du flux d’export de carbone. L’étude révèle en outre que les organismes sont peu dégradés, voire quasi intacts à cette profondeur, suggérant une chute rapide et donc un faible recyclage en CO2 pendant la descente. Une étude complémentaire révèle que certains de ces organismes (Trichodesmium) sont encore vivants à 1000 m de profondeur, confirmant leur chute rapide (plusieurs centaines de mètres par jour) vers l’océan profond, où ce carbone sera piégé sur le long terme. Ces travaux appellent à explorer en détail le rôle des diazotrophes dans la pompe biologique à carbone, afin de comprendre leur rôle potentiel dans l’océan du futur, ce qui sera réalisé dans le cadre du projet HOPE1 .

  • 1Projet HOPE ‘How do diazotroph shape the ocean biological carbon pump’ : A global approach from the single-cell to the ecosystem. Projet ERC CoG 2023-2028 et coordonné par Sophie Bonnet.

Laboratoire CNRS impliqué

Institut méditerranéen d’océanologie (MIO / Osu Pythéas)

Tutelles : CNRS / IRD / AMU / Univ. De Toulon

Neige marine. © Newatlas

Pour en savoir plus

Références 

Bonnet, S., Benavides, M., Le Moigne, F.A.C. et al. Diazotrophs are overlooked contributors to carbon and nitrogen export to the deep oceanISME J (2022).

Benavides, M., Bonnet, S., Le Moigne, F.A.C. et al. Sinking Trichodesmium fixes nitrogen in the dark oceanISME J 16, 2398–2405 (2022).

Contact

Sophie Bonnet
Directrice de recherche IRD à l’Institut méditerranée d’océanologie (MIO)
Mar Benavides
Chercheuse IRD à l’Institut méditerranéen d’océanologie (MIO)