JFAST (Japan Trench Fast Drilling) -- Pour la compréhension du tsunami dévastateur consécutif au séisme de Tohoku de mars 2011

Océan Atmosphère

Le principal objectif du projet JFAST est de comprendre l’importante rupture sismique qui a eu lieu au large de la côte pacifique du Japon, lors du séisme de Tohoku de mars 2011. Au cours de ce séisme, la faille qui accommode le mouvement de subduction a glissé d’environ 30 à 50 m dans sa partie peu profonde. Ce glissement a engendré un tsunami responsable de très importants dégâts et la mort de milliers de personnes le long de la côte nord-est de Honshu. La compréhension des mécanismes mis en jeu dans le séisme et le tsunami de Tohoku permettra une meilleure évaluation (et prévention) des risques liés à ces phénomènes au Japon et dans d’autres zones de subduction à travers le monde. Le site de forage est localisé au large de la péninsule d’Oshika, à l’ouest de l’axe de la fosse du Japon. La profondeur d’eau du premier site foré sera de 6910m, sous laquelle le Chikyu forera 1000 mètres de roche pour atteindre la zone de faille. Les membres de l’expédition embarqueront le 1er avril 2012 sur le bateau de forage Chikyu afin de relever le défi d’aller forer dans la zone de faille du séisme de Tohoku. Parmi eux Marianne Conin chercheuse au CEREGE (CNRS, Univ. Aix Marseille) pour l'analyse en forage des propriétés physiques.


Avant ce séisme, on pensait que les propriétés mécaniques de la zone de faille dans la partie proche de la fosse de subduction ne permettaient pas l’accumulation de contraintes entre deux séismes, ni la propagation de la rupture sismique jusqu’à la surface du plancher océanique. Dans ce sens, il semblait peu probable qu’un séisme de subduction soit accompagné d’un tel glissement jusqu’à la fosse. Le séisme de Tohoku de mars 2011 (de magnitude 9.0) vient de démontrer que ce type de situation est en réalité envisageable.


Le projet JFAST doit permettre de comprendre comment un tel glissement a pu avoir lieu dans cette région. Pour cela il s’est fixé deux objectifs. Le premier est de prélever des échantillons dans la zone de faille pour en déterminer les propriétés physiques. Le second est d’effectuer des mesures de température afin d’estimer la contrainte en friction qui a eu lieu au cours du séisme.


L’échantillonnage d’une zone de faille ayant eu une activité récente aussi importante n’a encore jamais été réalisé. Ces échantillons devraient donc fournir d’importantes informations géologiques. En particulier, l’étude détaillée de leurs propriétés physiques, de l’état des fluides, et des propriétés de glissement devraient permettre de comprendre les processus mis en jeu au niveau de la faille au cours de ce séisme.
L’une des données clés pour comprendre la naissance et la propagation des ruptures sismiques est de connaître l’état de contrainte et la friction dynamique sur la faille.

L’une des manières les plus directes pour estimer la friction sur la faille au cours des séismes est de mesurer la chaleur résiduelle sur la faille. Les calculs théoriques montrent que ces mesures doivent être réalisées au cours des 2 années qui suivent le séisme afin de résoudre précisément le signal de diminution de température. Par ailleurs, plusieurs mesures telles que la température du matériel de la faille, la perméabilité de la zone de faille, les propriétés chimiques des fluides et des roches sont nécessaires pour estimer correctement la friction. Ces mesures varient fortement en fonction du temps, il est donc important d’effectuer le forage le plus rapidement possible après le séisme.


L’expédition IODP 343, appelée J-FAST pour ‘réponse rapide au séisme du Japon’, requiert une mobilisation particulièrement efficace des moyens humains et techniques d’IODP afin que les mesures soient réalisées rapidement. Le forage de l’expédition JFAST nécessitera environ 8000 mètres de tubes de forage, ce qui représente un grand challenge scientifique et technologique. Un seul autre forage océanique a réussi à forer le plancher océanique dans une profondeur équivalente. Il s’agit du forage DSDP dans la fosse des Mariannes en 1978, sous 7034 mètres d’eau. Cependant ce forage avait seulement atteint 15.5 mètres de profondeur sous le plancher océanique.


Les principales opérations prévues au cours du forage consistent à forer 2 puits sur un site unique ; le premier puits permettra de collecter des mesures géophysiques afin de déterminer l’état de contrainte in situ et de localiser précisément la zone de faille. Le second puits permettra de récupérer des échantillons de part et d’autre de la zone de la faille, et dans la zone de faille. Dans chaque puits un observatoire comprenant des outils de mesure de température et de pression sera installé. Un outil comprenant 55 capteurs de température sera installé dans le premier puits et attaché à la tête de forage. Dans le second puits, une série de capteurs sera installée sur les parois du puits de forage afin de mesurer la pression de fluide dans les pores à l’intérieur et de part et d’autre de la zone de faille. Les données de pression et de température seront recueillies à distance. Les données d’observatoire des deux puits seront collectées par le KAIKO 700011, un robot ‘grandes profondeurs’ appartenant au JAMSTEC.

Contact : marianne.conin@gmail.com