Dégazage d’hélium et d’hydrogène : un éclairage sur les mécanismes de remontée à la surface

Résultat scientifique Surfaces continentales

Une étude parue dans Geochemistry, Geophysics, Geosystems révèle certains mécanismes de dégazage naturel de l’hélium (He)  et de l’hydrogène (H₂)  depuis le sous-sol jusqu’à la surface. En combinant approches géophysiques et géochimiques, les chercheuses et chercheurs révèlent comment ces gaz suivent des cheminements le long de failles profondes, jusqu’à émerger à la surface dans des sources millénaires. Une avancée pour la compréhension des dynamiques profondes et des interfaces géologiques complexes.

C’est au cœur du site des Fontaines Salées, dans l’Yonne, qu’a été menée cette étude interdisciplinaire. Ce site exceptionnel, à la croisée des sciences de la Terre et de l’archéologie, abrite des puits néolithiques vieux de 4300 ans. Certains d’entre eux montrent encore un dégazage régulier sous forme de bulles gazeuses, principalement composées d’azote, mais présentant des concentrations très élevées d’hélium (jusqu’à 5 %v).

Des gaz aux origines multiples

 

En combinant imagerie géophysique, mesures de concentration de gaz dans le sol, analyses isotopiques et modélisation géochimique, les scientifiques ont cherché à comprendre l’impact de la structure géologique sur l’origine et les mécanismes de remontée de ces gaz, ainsi que les interactions biologiques avec le sol lors de cette remontée.

Deux types d’origines pour les gaz émis ont été identifié : géologiques (notamment pour l’He radiogénique) et potentiellement biologiques (en particulier pour l’H₂). Le site constitue un laboratoire naturel pour comprendre comment ces gaz, migrent jusqu'à la surface.

Coupe géologique Ouest-Est localisant les Fontaines Salées.

Failles et interfaces : les routes secrètes des gaz

 

L’étude a permis de reconstituer le schéma structural du sous-sol, révélant deux failles normales sub-parallèles et une zone pluri-métrique localisée à 10–30 m de profondeur. Cette zone, identifiée par méthodes électrique et sismique, est interprétée comme un réservoir d’eau enrichi en bulles de gaz d’azote riches en hélium. La concentration en hélium dans le sol, atteignant 1 % sur un « point chaud », corrobore cette hypothèse. La migration des gaz semble suivre un cheminement préférentiel par advection d’eau le long de la faille, jusqu’à émerger dans les puits ; où les concentrations en hélium atteignent 5% dans le gaz libre prélevé.

Un éclairage nouveau sur les dynamiques profondes

 

Les données ont permis de construire un modèle géochimique simple pour expliquer la signature géochimique du gaz de bulle d’azote riches en He, par l'exsolution de l'azote dissous lors de paléo-recharge d’eaux météoriques dans le Morvan.

Lors de leur infiltration à plusieurs kilomètres de profondeur, ces eaux se chargeraient en hélium radiogénique avant de migrer vers l’interface socle-couverture pour remonter en surface par les failles. Concernant l’hydrogène (H₂), sa plus grande solubilité suggère un mécanisme de remontée à la surface basé      sur sa diffusion à travers les argiles et sa production/consommation biologique en fonction de l’aération du sol. Toutefois une remontée advective n’est pas exclue dans certaines zones.

Ces résultats apportent un éclairage nouveau sur les dynamiques dans les interfaces socle-couverture et offrent des perspectives pour la surveillance de l’activité tectonique ou la prospection de ressources naturelles comme l’hélium ou l’hydrogène.

Laboratoire CNRS impliqué

Géosciences Paris-Saclay (GEOPS -OSUPS) Tutelles : Univ Paris-Saclay / CNRS

Contact

Emmanuel Léger
Enseignant Chercheur à l'Université Paris-Saclay
Benjamin Brigaud
Enseignant-chercheur de l’Université Paris Saclay au laboratoire Géosciences Paris-Saclay (GEOPS)