Climat : le paradoxe énergétique des hivers plus doux
Malgré des hivers plus doux et une baisse globale des besoins en chauffage, les vagues de froid, bien que plus rares, engendreront des pics de demande additionnelle plus intenses. Une étude réalisée par le CNRS Terre & Univers (voir encadré) et EDF, montre la nécessité d'adapter le réseau électrique français face à une consommation et production électriques plus variables et de repenser les mécanismes de financement de la flexibilité.
L’électrification des usages, notamment pour le chauffage, est un levier essentiel de la transition énergétique. En France, où l’électricité occupe une place centrale dans le secteur du bâtiment, cette transition est déjà bien engagée. Dans un contexte de réchauffement climatique, on pourrait penser que les besoins en chauffage diminuent et que la pression sur le réseau électrique s’allège. Or, cette étude révèle un paradoxe : les vagues de froid, bien que moins fréquentes, engendreront des pics de demande additionnelle plus intenses, mettant le système électrique sous contrainte à des moments critiques.
Modèle de consommation et simulations climatiques
Les scientifiques ont utilisé une approche basée sur les degrés-jours de chauffage, combinée à un modèle de consommation électrique. Dix simulations climatiques ont permis d’analyser quatre scénarios d’émissions. En maintenant constants les usages et équipements actuels, l’étude isole l’effet du climat sur la demande hivernale d’électricité, notamment en période de froid extrême. Cette étude ne prend cependant pas encore en compte toutes les dynamiques d’évolution de la demande (électrification croissante, efficacité énergétique, etc.), ce qui pourrait renforcer ou atténuer les tendances observées.
Adapter le réseau électrique français
La demande annuelle liée au chauffage pourrait baisser de 4 à 12 % d’ici 2085. Cependant, la consommation électrique additionnelle durant les vagues de froid pourrait être +35 % plus élevée qu’un jour normal contre +25 % aujourd’hui. Cette pression ponctuelle, mais accrue, nécessite d’adapter le réseau électrique, face à une consommation et une production électrique plus variables. Les moyens de flexibilité, comme les centrales de pointe, pourraient être moins sollicités mais devoir fournir des puissances plus élevées, posant la question de leur viabilité économique. Ces résultats appellent à repenser les mécanismes de financement de la flexibilité, par l'offre, la demande et le stockage, et à adapter le réseau pour plus de résilience.

Laboratoire CNRS impliqué
Laboratoire de météorologie dynamique (LMD - ECCE TERRA)
Tutelles : CNRS / ENS-PSL / Ecole polytechnique / Sorbonne Université
Pour en savoir plus
Filahi, H., Drobinski, P., Oueslati, B. et al. Rising power system strains despite decreasing heating demand in a warming climate. Sci Rep 15, 12470 (2025).