Des isotopes révèlent la transformation du fer dans l’atmosphère
Une étude internationale publiée dans Atmospheric Chemistry and Physics révèle que le fer contenu dans les aérosols subit une dissolution importante lors de son transport au-dessus du Pacifique. En analysant la composition isotopique du fer (δ⁵⁶Fe), les scientifiques du LEGOS, en collaboration avec des institutions américaines, ont pu mettre en évidence un processus clé de transformation atmosphérique. Ces résultats apportent un éclairage nouveau sur les mécanismes de transfert et de transformations de la matière depuis les continents vers les océans.
Les organismes photosynthétiques ont besoin de fer pour assurer des fonctions essentielles telles que la respiration, la photosynthèse ou l'assimilation de nutriments. Dans la moitié de l'océan, les très faibles concentrations de fer (moins d'un gramme pour 100 millions de litres d'eau) limitent cette production primaire : les algues peuvent être qualifiées d’« anémiques ». En contrôlant ainsi la croissance du phytoplancton, la structure des écosystèmes et l’intensité de la production primaire, le fer influence in fine le cycle du carbone. Il est de ce fait un élément clef dans l’étude des cycles biogéochimiques océaniques et du climat.
Une analyse isotopique fine pour suivre les aérosols
Le Pacifique Equatorial Est est l'une de ces régions où le fer est limitant. Il y est apporté par les courants marins qui transportent du fer d'origine sédimentaire et par les poussières atmosphériques. Ces dernières peuvent être d’origine naturelle (roche, sol, etc.) ou anthropique (cendres de diverses origines, fumée de pots d’échappement, etc.). Une équipe de chercheuses et chercheurs du LEGOS et de l’Université de Washington, a adopté une stratégie bas carbone en exploitant des données existantes provenant de la campagne EUCFe (Equatorial Undercurrent Fe) menée à bord du navire océanographique Kilo Moana entre août et octobre 2006. Les concentrations et compositions isotopiques du fer des aérosols prélevés au-dessus de l'océan Pacifique équatorial et tropical, ont été analysées. Ces zones étaient non documentées jusqu'à présent.

Premiers indices in situ de transformations atmosphériques
Les résultats révèlent que la majorité des échantillons présentent des signatures isotopiques plus lourdes que la croûte terrestre (~13%), suggérant une dissolution partielle du fer au cours du transport atmosphérique, suivie de l’élimination de la fraction dissoute. Ce processus, jusqu’alors observé uniquement en laboratoire, est ici documenté pour la première fois dans l’environnement naturel. Ces observations soulignent l’importance des isotopes du fer comme traceurs des transformations atmosphériques du fer, améliorant ainsi notre compréhension des apports en fer biodisponible aux océans.

Pour en savoir plus
Iron isotopes suggest significant aerosol dissolution over the Pacific Ocean
Atmospheric Chemistry and Physics, 2025
Laboratoire CNRS impliqué
Laboratoire d'Etudes en Géophysique et Océanographie Spatiales (LEGOS) Tutelles : CNRS, CNES, IRD, Université de Toulouse