Frédéric Parrenin reçoit la médaille de bronze 2008 du CNRS

Prix et distinction

« Si j’avais fait une thèse en maths, j’aurais été encore plus déconnecté de la réalité que si j’avais été agriculteur »,

estime Frédéric, ancien normalien et fils d’agriculteurs, un groupe sociologique très minoritaire au sein de la prestigieuse école. « J’aimais faire des maths dans une classe avec des interactions avec les autres. Quand je me suis retrouvé seul devant mon bureau, j’ai compris que mon parcours devait changer. »

Soulagement, l’École normale supérieure (ENS) autorise ses étudiants à découvrir d’autres disciplines si bien qu’après deux années d’études de maths, le Franc-Comtois s’oriente vers les sciences de la terre. Choix en adéquation avec son profond attachement pour la nature. Sa thèse de maths appliquées consacrée à la datation des carottes glaciaires est dirigée par Jean Jouzel et Dominique Raynaud, qui ont fait de la France, avec Claude Lorius, un des pays leaders en matière de recherche sur les carottes glaciaires depuis trente ans. Voici donc Frédéric accueilli dans la petite famille des glaciologues français.

Faire parler les carottes glaciaires, véritables archives paléoclimatiques, est le quotidien de ce jeune chercheur de 33 ans au sein du laboratoire de Grenoble1. Une difficulté à contourner : la glace ne peut être datée par la radioactivité. « Tout repose sur l’intégration dans un modèle statistique de données diverses, telles que la présence de couches de cendres, les variations d’orbite de la Terre ou encore la modélisation de l’écoulement de la glace. »

Ces travaux sur les carottes permettent d’appréhender les changements climatiques sur une très longue échelle. Ainsi le forage au Dôme C en Antarctique a permis de décrypter au printemps 2008 le climat en remontant jusqu’à 800 000 ans dans le passé. Un éclairage indispensable aujourd’hui.

Ces études fournissent en effet des éléments pour élaborer les modèles climatiques du futur : la corrélation entre l’émission des gaz à effet de serre et les variations de températures découle de ces recherches. De même que la notion récente de « bascule climatique », soit un refroidissement au Groenland qui a pour conséquence un réchauffement progressif de l’Antarctique. « Comme elles font rêver et sont compréhensibles par le plus grand nombre, nos recherches ont permis de tirer une sonnette d’alarme. » Frédéric, auteur-contributeur du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), donne donc régulièrement des conférences pour le grand public.

Ces études fournissent des éléments pour élaborer les modèles climatiques du futur.

Et la magie du terrain ? Pour partir dans les contrées glaciales, Frédéric doit contrarier son caractère casanier et enclin au mal du pays. L’expédition au Spitzberg en avril 2006 l’a cependant enchanté : basé sur Vagabond, un bateau pris dans la glace, le jeune glaciologue s’est rendu en motoneige sur le lieu d’étude. L’occasion de voir un ours polaire. De l’autre côté du globe, le scénario diffère. Si l’Antarctique offre de « beaux phénomènes lumineux » dans le ciel, la monotonie du désert de glace rend les missions plus difficiles pour notre chercheur.

Notes

 

  1. Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (LGGE) : CNRS / Université Joseph Fourier Grenoble 1