Vue d'artiste de la magnétosphère terrestre couplée à des simulations numériques de la turbulence dans un plasma magnétisé (code HVM). © Image adaptée d'EUMETSAT/ESA et ESA/ATG Medialab.

Intrication entre reconnexion magnétique et turbulence dans les plasmas astrophysiques

Résultat scientifique Univers

Les plasmas astrophysiques sont souvent dans un état turbulent, caractérisé par un transfert d'énergie à travers différentes échelles jusqu'à atteindre les plus petites échelles du système où est finalement dissipée, sous forme de chauffage ou d’accélération du plasma. Comprendre ce phénomène est essentiel pour aborder de nombreuses problématiques astrophysiques telles que la formation stellaire et l'accrétion de matière autour des trous noirs. Un autre phénomène important est la reconnexion magnétique qui se produit dans de fines couches de courant électrique et entraîne un changement de configuration du champ magnétique et une intense dissipation locale d'énergie. C’est ce phénomène, à l’œuvre dans les environnements des étoiles, qui produit les éruptions stellaires. Malgré l'importance de ce processus et de son couplage avec la turbulence, une mesure quantitative du taux local de dissipation de l'énergie turbulente fait encore défaut. Cette lacune vient d’être comblée par les travaux d’une équipe franco-italienne dont des scientifiques du CNRS (voir encadré).

L'application d'une technique basée sur le "filtrage spatial"(1) aux données mesurées dans la magnétogaine terrestre par la mission magnétosphérique NASA/MMS (Fig. 1) a permis de franchir une étape importante dans la compréhension de l’intrication entre turbulence et reconnexion. En effet, une intensification des transferts d'énergie aux échelles inférieures au rayon de giration des ions a été observée là où la reconnexion magnétique se produit (Fig.2). Les résultats ont été confirmés dans les simulations numériques de turbulence utilisant le code HVM(2). Ce travail démontre que la reconnexion magnétique peut à elle seule générer des fluctuations turbulentes à petites échelles.

Ce nouveau mécanisme peut potentiellement résoudre un paradoxe soulevé par les observations faites dans diverses magnétogaines planétaires, à savoir l'omniprésence des fluctuations turbulentes à des échelles sous-ioniques même lorsqu'aucune cascade d'énergie n'est observée aux plus grandes échelles(3).

Laboratoires impliqués

Laboratoire CNRS impliqué : 

Laboratoire de Physique des Plasmas (LPP) 

Tutelles : CNRS / École Polytechnique / Sorbonne Université 

Autre : 

Università di Pisa, Italie

Vue d'artiste de la magnétosphère terrestre couplée à des simulations numériques de la turbulence dans un plasma magnétisé (code HVM).© Image adaptée d'EUMETSAT/ESA et ESA/ATG Medialab.
Coupe dans le domaine d’une simulation numérique de turbulence combinée avec des mesures d’une couche de courant faites par la mission NASA/MMS montrant l'intensification du transfert d'énergie turbulent estimé où la reconnexion magnétique se produit.

Pour en savoir plus

Manzini, D., F. Sahraoui, F. Califano, Sub-ion scale turbulence driven by magnetic reconnection, Phys. Rev. Lett., 130, 205201 (2023). 

[1] Manzini, D., F. Sahraoui, F. Califano, Local energy transfer and dissipation in incompressible Hall magnetohydrodynamic turbulence: The coarse-graining approach, Phys. Rev. E, 106, 035202 (2022). 

[2] Valentini, F., Trávníček, P., Califano, F., Hellinger, P., Mangeney, A. A hybrid-Vlasov model based on the current advance method for the simulation of collisionless magnetized plasma J. Comput. Phys. 225, 753 (2007).

[3] Huang, S. Y., L. Z. Hadid, F. Sahraoui, Z. G. Yuan, X. H. Deng, On the existence of the Kolmogorov inertial range in the terrestrial magnetosheath turbulence, ApJL, 836 (1), L10, 2017. 

Contact

Davide Manzini
Doctorant au Laboratoire de physique des plasmas (LPP)
Fouad Sahraoui
Chercheur CNRS au Laboratoire de physique des plasmas (LPP)