Laurent Bopp : une médaille d’argent pour l’étude des cycles biogéochimiques océaniques
Directeur de recherche en sciences du climat au Laboratoire de météorologie dynamique de l’Institut Pierre-Simon Laplace (LMD, CNRS / École polytechnique / ENS-PSL / Sorbonne Université), Laurent Bopp est un spécialiste du cycle du carbone dans l'océan. Il s’intéresse en particulier au changement climatique et ses interactions avec les écosystèmes, la biodiversité et l’environnement océaniques.
À différentes échelles spatiales et temporelles, en utilisant principalement la modélisation, il cherche à déterminer comment les bouleversements en cours perturbent la biogéochimie marine, et comment ces modifications peuvent - et pourront - rétro-agir sur le climat. Il a ainsi développé de nouveaux modèles numériques pour mieux comprendre l’évolution du puit de carbone océanique. Plus récemment, il interroge le rôle de la végétation côtière - comme les forêts de mangroves et les macroalgues - dans le cycle du carbone global, et les effets de l’acidification sur les écosystèmes côtiers.
C’est la lecture du deuxième rapport du GIEC, en 1996, et l’influence de professeurs, comme Gérard Mégie, qui ont éveillé chez Laurent Bopp une vocation pour la "machine climatique". Depuis son entrée au CNRS en 2003, il s’attache à décrypter les liens complexes entre climat et cycles biogéochimiques marins. Il conçoit des modèles numériques intégrant physique, chimie et biologie pour simuler le cycle du carbone dans l’océan et en évaluer les réponses au changement climatique.
Laurent Bopp étudie en particulier la capacité de l’océan à absorber le carbone atmosphérique - près de 25 % des émissions mondiales de CO₂ - et son évolution au cours du siècle. Ses travaux ont montré qu’« en diminuant sa solubilité et en accentuant la stratification des eaux, le réchauffement climatique réduit l’efficacité de l’océan à absorber le CO₂ ». Une rétroaction positive : plus le climat se réchauffe, moins l’océan absorbe de CO₂, accélérant ainsi le changement climatique.
Dans le prolongement de ses recherches, il s’est intéressé à son impact sur la chimie de l’océan et les écosystèmes marins, notamment via l’acidification, la hausse des températures, la désoxygénation et la modification des courants. En couplant modèles de climat et une représentation des écosystèmes marins, il a montré que la diminution des nutriments en surface pourrait réduire la productivité du phytoplancton, affectant ainsi toute la chaîne alimentaire marine.
Il explore aussi les limites géophysiques et environnementales de solutions innovantes mais encore théoriques de séquestration du carbone dans l’océan, comme la culture de macroalgues, la fertilisation ou l’alcalinisation.
Laurent Bopp s'intéresse plus récemment aux mangroves et aux écosystèmes côtiers, « longtemps mal représentés dans les modèles globaux en raison de leur faible résolution spatiale ». Il cherche désormais à améliorer ces modèles pour mieux prendre en compte leur rôle dans les transferts de carbone entre terre et mer.
Professeur attaché à l’ENS de 2016 à 2022, il insiste sur l’importance de sensibiliser les jeunes générations aux enjeux climatiques. Il a aussi participé comme auteur principal aux 5e et 6e rapports du GIEC. Laurent Bopp, récemment élu à l’Académie des sciences, voit dans la médaille d’argent du CNRS une reconnaissance de ses travaux, mais aussi de l’importance croissante des enjeux environnementaux liés à l'océan.