Image de l'amas globulaire NGC 6397 prise avec le télescope de 2,2 m de l'ESO. Les carrés jaunes représentent les étoiles cibles observées avec le VLT équipé du spectrographe FLAMES-UVES.

© ESO.[...]
Image de l'amas globulaire NGC 6397 prise avec le télescope de 2,2 m de l'ESO. Les carrés jaunes représentent les étoiles cibles observées avec le VLT équipé du spectrographe FLAMES-UVES.

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Mais où est passé le lithium primordial ?

Univers

Pourquoi ne retrouve-t-on pas autant de lithium dans les étoiles vieilles qu'il y en avait à l'origine de l'Univers ? Une équipe internationale(1) dont fait partie un astrophysicien du GRAAL (CNRS, Université de Montpellier 2), Olivier Richard, aurait résolu l'énigme. Dans un article publié dans Nature (2006, vol. 442, p. 657) les chercheurs montrent que les abondances atmosphériques de plusieurs éléments chimiques, dont le lithium, varient avec le stade évolutif des étoiles et que ces variations correspondent à celles prédites par les modèles d'évolution stellaire développés à Montréal et à Montpellier dans la mesure où ces modèles tiennent compte des effets de la diffusion des éléments à l'intérieur de l'étoile.

Les observations du fond cosmologique effectuées par le satellite WMAP ont permis de fortement contraindre les paramètres cosmologiques de l'Univers. En particulier la densité baryonique (densité de matière ordinaire) déterminée par ces observations, combinée avec les modèles standards de nucléosynthèse primordiale, permet de déterminer avec une précision sans précédent les quantités d'hydrogène, d'hélium et de lithium produits peu de temps après le Big Bang. L'abondance primordiale prévue de lithium est un facteur de deux à trois fois plus haute que la valeur mesurée dans les atmosphères des vieilles étoiles. Avec des erreurs estimées de 10 à 25%, cette différence en abondance de lithium défie sérieusement notre connaissance de la physique stellaire, de la nucléosynthèse primordiale ou des deux. Certaines modifications des modèles de nucléosynthèse primordiale ont été proposées, mais se sont révélées expérimentalement non valables. La théorie de la diffusion, cependant, prévoit que les abondances atmosphériques des étoiles changent avec le temps, ce qui offre une explication possible de cette différence d'abondance de lithium.

Image de l'amas globulaire NGC 6397 prise avec le télescope de 2,2 m de l'ESO. Les carrés jaunes représentent les étoiles cibles observées avec le VLT équipé du spectrographe FLAMES-UVES. © ESO.
Les amas globulaires sont très utiles pour étudier ce problème car les étoiles de ces amas ont toutes le même âge et ont eu la même composition chimique initiale, mais sont à différentes étapes d'évolution (en fonction de leur masse). En comparant les abondances atmosphériques, déterminées à partir des observations d'un ensemble d'étoiles de l'amas globulaire NGC 6397 effectuées au Very Large Telescope de l'ESO avec le spectrographe FLAMES-UVES, à celles prédites par les modèles évolutifs de ces étoiles calculés au RQCHP et au CINES, l'équipe conclut que le fer, le calcium, le titane et le lithium diffusent vers l'intérieur de l'étoile au cours du temps ce qui conduit à une sous-abondance apparente de ces éléments. Ces résultats apportent des indices en faveur d'une solution stellaire au problème du lithium cosmologique. L'abondance originelle de lithium estimée pour ces étoiles, grâce à ces modèles évolutifs, est d'environ deux fois l'abondance actuelle et est en accord avec les prédictions des modèles de nucléosynthèse primordiale. Ces résultats confirment les effets de la diffusion dans les vieilles étoiles qui ont été prédits depuis longtemps par les astrophysiciens théoriciens et la nécessité d'inclure ce processus physique dans les calculs des modèles évolutifs.

Notes

 

  1. L'équipe se compose d'Olivier Richard du GRAAL, d'Andreas Korn, Paul Barklem, R. Collet, Nikolai Piskunov, et Bengt Gustafsson de l'université d'Uppsala (Suède), de Frank Grundahl de l'université d'Aarhus (Danemark), et de Lyudmila Mashonkina de l'académie russe de la Science (Russie).