Preuves en laboratoire de l’altération spatiale de l’extrême surface de l’astéroïde Ryugu

Résultat scientifique Univers

En décembre 2020, la sonde Hayabusa2 (JAXA) a ramené sur Terre 5,4 g de matériaux de l’astéroïde primitif Ryugu, une première pour ce type d’objet. Ces échantillons uniques nous permettent notamment de retracer les processus physico-chimiques des premiers instants du Système Solaire. Ils ont été prélevés à la surface de l’astéroïde à deux emplacements, dont l’un après excavation du matériel grâce à un impacteur, permettant ainsi d’avoir accès à la sous-surface. La comparaison des échantillons provenant de ces deux sites permet de mieux comprendre la formation et l’évolution de Ryugu, de même que les éventuels processus qui peuvent affecter les propriétés physiques et de composition de la surface de ce type d’objet.

Une équipe de recherche incluant des scientifiques français et japonais (voir encadré), a réalisé l’étude de 177 grains de taille millimétrique, provenant des deux sites de collecte, avec le microscope hyperspectral proche-infrarouge MicrOmega1 . La réalisation de ces mesures, au sein même du centre de Curation2  de l’ISAS au Japon sous une atmosphère contrôlée (N2), a notamment permis d’éviter toute exposition à l’atmosphère terrestre de ces échantillons depuis leur collecte sur Ryugu.

L’étude de leurs propriétés spectrales a révélé de petites variations de composition entre les grains de surface et de sous-surface qui seraient liées à l’altération spatiale3 des matériaux présents en surface. Les propriétés mises en évidence suggèreraient notamment que les matériaux en sous-surface n’ont jamais été exposés à l’environnement spatial.

Ces mesures ont également révélé que les échantillons de Ryugu contenaient beaucoup moins d’eau que les météorites primitives dont la composition minéralogique et élémentaire est pourtant très proche. La faible quantité d’eau dans les grains suggère qu’une partie de l’eau des météorites primitives pourrait provenir de la contamination par l’atmosphère terrestre. Ainsi, Ryugu offre une nouvelle référence pour caractériser l’abondance de l’eau dans les corps primitifs du système solaire.

  • 1Développé par l’IAS avec le soutien du CNES et installé à l’Institute of Space and Astronautical Science (ISAS) au Japon.
  • 2Centre de conservation et d’analyse d’échantillons extraterrestres dans des conditions propres.
  • 3 L’altération spatiale modifie la composition des surfaces des corps sans atmosphères du système solaire et combine le bombardement par les micrométéorites, par les ions du vent solaire et l’irradiation par les rayons cosmiques.

Laboratoire CNRS impliqué

Institut d’astrophysique spatiale (IAS -OSUPS)

Tutelles : CNRS / Université Paris Saclay

© A: JAXA, University of Tokyo, Kochi University, Rikkyo University, Nagoya University, Chiba Institute of Technology, Meiji University, University of Aizu, AIST.

Légende

A : les deux sites de collecte à la surface de l’astéroïde Ryugu. B : bande d’absorption à 2.7 µm observée dans les spectres proche-infrarouge de grains millimétriques de Ryugu. C : diagramme de dispersion entre la profondeur et la position de pic de la bande à 2.7 µm.

Pour en savoir plus

Le Pivert-Jolivet, T., Brunetto, R., Pilorget, C. et al. Space weathering record and pristine state of Ryugu samples from MicrOmega spectral analysisNat Astron (2023). 

 

Contact

Tania Le Pivert-Jolivet
Chercheuse CNRS à l'Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS)